Aller directement au contenu

Si vous aimez bien mettre un nom sur un visage et vice-versa, vous allez être satisfait. Découvrez la charmante corsaire qui orne l’avant de l’Etoile du Roy, amarrée à quelques pas du stand du Département.

Lors de cette édition 2023, elle fut parmi les premiers navires à atteindre Rouen. Auréolée d’une prestigieuse réputation, l’Etoile du Roy attire les visiteurs de tout bord mais aussi les stars. Les acteurs François Civil, Romain Duris et Vincent Cassel ont par exemple navigué sur ce gréement pour incarner D’Artagnan, Aramis et Athos dans le premier volet des Trois Mousquetaires, film sorti dans les salles obscures en avril dernier. Actuellement à Rouen, c’est le grand public qui part à l’abordage de ce vaisseau et les enfants se plaisent à jouer les pirates sur son pont.

Sous le beaupré de ce fameux trois-mâts, la silhouette dorée d’une femme aux atouts généreux brille de mille feux au soleil et attire l’œil. Gare à tout regard trop insistant : prête à en découdre, elle tient son épée d’une main ferme. Son nom : Violette de la Hisse. Ce personnage n’a toutefois pas sillonné les mers depuis le lancement du bateau. Avant qu’elle ne prenne possession de cette place privilégiée pour fendre les flots, un homologue masculin l’occupait.

Une rapide plongée historique s’impose. Cette réplique en bois d’une frégate corsaire malouine de 1745 – un navire de 310 tonneaux armé de 20 canons et un équipage de 240 hommes – a été construite en Turquie en 1996, sous l’impulsion de l’armateur Michael Turk. Ce dernier la baptisa en toute modestie Grand Turk, un nom qui parlera certainement à ceux qui ont fréquenté l’Armada en 2003 et 2008. Elle servait de lieu de décor de la série télévisée britannique Hornblower, relatant les exploits d’un brillant officier de la Royal Navy qui savait employer la ruse avec brio. La figure de proue était un homme portant un turban rouge vif et de grosses moustaches.

Un nouveau cap a été fixé en 2010, année où le bateau devint le navire amiral de la flotte Etoile Marine Croisières. Depuis, son port d’attache est la cité de Saint-Malo et son nouveau nom est l’Etoile du Roy. « La figure de proue initiale n’était pas en adéquation avec le bateau et nous avons donc exploré la légende de Violette de la Hisse, une sirène qui se serait transformée en corsaire. L’univers onirique et l’esprit de piraterie sont beaucoup plus cohérents. Ce personnage n’avait pas de représentation physique ; une illustratrice a alors dessiné ses traits puis un sculpteur lui a donné corps », relate Laurence Beucher, heureuse propriétaire aux côtés de son mari Wilfrid Provost. La femme corsaire a donc pris le pouvoir, ce qui est pleinement dans l’ère du temps puisque Laurence Beucher souligne au passage la mixité de ses équipes et notamment l’augmentation du nombre de femmes marins. « À Saint-Malo, notre navire fait musée à quai et peut être privatisé pour des déjeuners, soirées et sorties en mer. Depuis 2017, il est très sollicité pour le cinéma. »

C’est d’ailleurs pourquoi la belle Violette s’est récemment parée d’or. Auparavant, elle portait un bustier et un cache-œil noirs, une jupe bleue et une ceinture marron. Ses longs cheveux étaient roux. On peut donc s’interroger sur sa transformation. « Le gréement a changé de visage pour les besoins du film Napoléon de Ridley Scott, avec Joaquin Phoenix dans le rôle-titre, dont la sortie est attendue pour novembre prochain. Le tournage s’est déroulé à Malte. En amont, l’Etoile du Roy a quitté ses anciennes peintures rouge, bleu et jaune pour ne conserver que le noir et la figure de proue est devenue dorée. Il s’agit là des couleurs napoléoniennes », explique Laurence Beucher, reconnaissant au passage que ce relooking divise les admirateurs de la première heure. Créer ce débat n’est toutefois pas inutile : les goûts et les couleurs ne se discutent pas, mais ont le mérite de faire parler de ce fier navire.