Son image de fleuve industriel lui colle à la peau, et pourtant, en descendant le cours de la Seine, c’est une belle campagne verdoyante qui nous accompagne, tissée de forêts et de falaises lumineuses, depuis la boucle d’Elbeuf jusqu’au Havre.
A l’entrée du territoire seinomarin, la Seine fait mine de ralentir et dessine une suite de méandres qui vont en s’élargissant après le pont de Tancarville. Avant l’homme, l’eau a sculpté les paysages, façonnant des reliefs variés entre coteaux abrupts et plaines alluviales. Les forêts ont colonisé les hauteurs et les habitations ont épousé les pentes. Les marais drainés ont laissé place à des implantations industrielles ou des zones agricoles sur des parcelles en lanières.
Un Espace Naturel Sensible
A Heurteauville subsiste l’une des dernières zones humides, exploitée pendant plus de deux siècles pour la production de tourbe comme combustible d’abord, puis pour l’amendement. Racheté par le Département de la Seine-Maritime en 2005, le site de 196 hectares est désormais classé Espace Naturel Sensible et abrite de nombreuses espèces faunistiques et floristiques rares et protégées. Autour d’un vaste étang de 50 hectares, trois sentiers thématiques nous emmènent survoler la réserve sur des passerelles de bois. A plusieurs endroits, des stations pédagogiques invitent le promeneur à se familiariser avec son environnement et de nouveaux aménagements sont prévus. Tout ici est repos et silence, laissant remonter les bruits de la terre. Une cisticole des joncs fend le ciel et les herbes mouillées sèchent au vent. Chaque murmure ralentit la marche et met le regard aux aguets.
Une base de loisirs
Sur cette portion de fleuve domestiquée, la reconquête des espaces naturels est devenue un enjeu. Au Mesnil-sous-Jumièges, les anciens sites d’extraction ont été transformés en plan d’eau qui accueillent désormais les activités de la base de loisirs, une aubaine pour les familles venues à la belle saison profiter du grand air, les pieds dans le sable et la tête dans les cimes du parc accrobranche. En suivant le GR 2, on traverse le territoire du Parc naturel régional des boucles de la Seine normande où les paysages se succèdent, d’une campagne jardinée autour des activités de maraîchage et des vergers de la presqu’île de Jumièges aux grands espaces forestiers de Brotonne ou du Trait-Maulévrier. Depuis les falaises, les vues surplombantes donnent la mesure de cette géographie multiforme et font la joie des randonneurs.
Entre terre et mer
Arrivée à son embouchure, la Seine semble reprendre ses droits et couvre ses rives de miroirs d’eau tandis que les péniches dévient leur route en direction du canal de Tancarville. A la jonction entre la terre et les eaux salées, l’estuaire délimite un vaste espace naturel de près de 10 000 hectares, soumis à l’influence des marées et sur un axe majeur de migration des oiseaux. Un sentier pédagogique part à la découverte de la roselière, au pied des installations industrielles du port du Havre et face à l’envolée vertigineuse du pont de Normandie ouvrant sur le marais Vernier. A la croisée des enjeux économiques et environnementaux, la vallée de la Seine reste une terre de contrastes.