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Flavien Gobourg, marinier, fait voyager sur la Seine de nombreux usagers le temps d’un rapide trajet. Tantôt sur le pont, tantôt à la timonerie, cet agent départemental assure la traversée du fleuve via le bac de Jumièges.

Originaire d’Arques-la-Bataille, commune située à quelques kilomètres de Dieppe, Flavien Gobourg a grandi avec la mer. « Elle est essentielle pour moi. Aujourd’hui, j’habite plus loin de la côte mais il faut que je la retrouve régulièrement. Même en vacances, j’ai besoin d’air iodé et je ne peux pas envisager un séjour dans les terres ».
La figure paternelle n’est pas tout à fait innocente ; fils d’un marin pêcheur, Flavien conserve de doux souvenirs de son enfance. « Dès que le chalutier de mon père était amarré, on montait à bord pour en explorer tous les recoins : cabine, quartiers d’équipage, soute… On quittait le port pour quelques sorties et on participait chaque année aux fêtes de la mer. Le bateau constituait alors un terrain de jeu et toute sortie était comme un tour de manège ».

Flavien ne se destinait cependant pas à travailler en tant que marinier sur une quelconque embarcation. Une fois son bac littéraire option cinéma-audiovisuel en poche, il comptait poursuivre ses études dans cette voie de l’image. « J’étais très intéressé par la technicité mais je n’ai pas eu l’opportunité de concrétiser ce projet. J’ai enchaîné quelques petits boulots pour ne pas rester inactif, avant d’être confronté à une période de 6 mois de chômage qui ont été plutôt durs à encaisser ».

C’est alors qu’il candidate auprès du Département pour un emploi sur l’eau, plus précisément sur la Seine. En mai 2009, il fait ses débuts sur les bacs fluviaux de la Seine-Maritime. Le matelot veille alors à l’embarquement et au débarquement des véhicules et s’engage rapidement dans un processus de formation pour piloter lui-même la machine. « Alternant présence sur le pont et sessions théoriques, j’ai pu bénéficier d’une formule accélérée. En un an et demi, j’ai décroché toutes les attestations et certificats nécessaires pour la conduite d’un engin fluvial d’une longueur inférieure à 60 mètres ayant la spécificité d’accueillir des passagers ».

marinier Flavien Gobourg

Une fois ces formalités remplies, Flavien est donc apte à prendre de la hauteur pour grimper à la timonerie et prendre les commandes du bac. « Ma première traversée à ce poste a eu lieu au Mesnil-sous-Jumièges. J’avais naturellement une petite appréhension mais tout s’est très bien passé ! ». Pendant 8 ans en tant que remplaçant, il intervient tour à tour sur les six bacs fluviaux gérés par le Département, tantôt sur le pont, tantôt en cabine. En fonction des besoins, il change donc régulièrement de cadre. « Chaque passage d’eau a ses spécificités techniques et son public. Ceux de Dieppedalle et du Val de la Haye sont ancrés dans un paysage industriel et sont avant tout utiles aux nombreux ouvriers de ces grands sites. Ceux de La Bouille, du Mesnil-sous-Jumièges, de Jumièges et de Yainville ont un environnement plus rustique et sont empruntés par les habitués en semaine et de nombreux touristes les week-ends et jours fériés. Je rappelle que le service est assuré toute l’année excepté le 1er mai où les bacs sont au mouillage ».

Un marinier au bac de Jumièges

Depuis maintenant six ans, Flavien occupe un poste fixe sur le bac de Jumièges. Avec un réel enthousiasme puisque ce bac s’avère être son préféré. « La vue est ici très dégagée. Au lever du soleil, les teintes sont formidables. Lorsque la Seine est haute, on parvient à distinguer les tours de l’abbaye. En face se dresse le four à chaux d’Heurteauville ». Le marinier alterne toujours pont et timonerie, remplaçant le capitaine pendant ses congés. Il se plaît à contrôler les manettes pour assurer la liaison entre les deux rives, un exercice variable selon divers paramètres. « Aux beaux jours, la manœuvre est aisée mais il faut composer avec le passage des bateaux, le courant en fonction des marées et, en d’autres saisons, le mauvais temps, notamment le brouillard. On utilise alors tous les instruments à notre portée : gyrocompas, radar, feux de vue… En toute circonstance, la sécurité est notre maître-mot ».

Le rythme de travail est défini annuellement : deux services du matin (5h30-12h30), suivis de deux services d’après-midi (12h30-21h30), puis deux jours de repos. En quatorze ans d’activité sur les bacs, Flavien ne compte plus les traversées qui s’enchaînent à un rythme effréné aux horaires de pointe et se calent par rapport au planning horaire annoncé lorsque le flux de véhicules est plus calme. S’il partage quelques discussions cordiales avec les habitués, il apprécie les usagers de passage qui découvrent ce système de traversée fluviale. « Les touristes sont bien souvent surpris et ravis du voyage. Quand on leur annonce en plus que c’est gratuit, ils sont les plus heureux du monde ! Les enfants adorent et c’est toujours plaisant à voir. Une ambiance festive s’invite parfois tout à coup à bord lors de l’arrivée de groupes constitués : randonneurs, motards, cortège des véhicules d’un mariage… En revanche, nous sommes contraints de refuser l’embarquement de certains modèles de camping-cars et autres véhicules spéciaux, invitant alors leurs propriétaires à emprunter un autre itinéraire ».

Flavien Gobourg a eu l’occasion de se rendre sur les chantiers navals de Dieppe pour voir les futurs navires de la flotte départementale actuellement en construction. Partageant son expérience, l’agent contribue ainsi à la définition des bacs de demain.